Cette lettre n’est pas à lire comme une définition de ce que les machines à voter devraient être. Nous avons juste souligné les défauts navrants de ce qui existe. Nous avons des objections de principe au vote électronique.
prenom nom adresse cp ville
Référendum du 29 mai 2005, Bureau de vote de [VILLE] numéro [NUMERO ou NOM]
Monsieur le Président,
Par la présente lettre, je soussigné [PRENOM NOM], je vous prie de prendre acte :
que j’ai participé ce jour en qualité d’assesseur à l’organisation du référendum concernant le “ Traité établissant une Constitution pour l’Europe ”,
que j’ai constaté que vous proposez aux électeurs de voter avec un système automatisé,
qu’avec cette méthode je suis incapable entre autres de certifier aux électeurs que leur “ bulletin électronique ” ait bien crédité le compte de voix correspondant à leur choix. La “ visualisation du vote ” sur l’interface proposée par la machine à voter ne peut en aucun cas en apporter matériellement la confirmation à l’électeur, un ordinateur pouvant afficher quelque chose et enregistrer autre chose. De plus, cet écran de taille modeste ne permet pas un confort de lecture suffisant pour un malvoyant.
que la procédure dite “ d’initialisation de la machine ” et la procédure de vérification de la vacuité de l’urne au début du scrutin ne peuvent pas apporter de garanties sur l’intégrité même du scrutin, car elle n’est qu’une procédure (édictée par le fabricant) dont je ne connais pas le fonctionnement intime (ce que fait concrétement l’ordinateur), et que je ne peux que la suivre sans comprendre. Cela est très différent d’une urne transparente dont je comprends le fonctionnement exact.
que l’agrément technique attribué à la Machine NEDAP modèle ESF1 par le Ministère de l’Intérieur, de la Sécurité Intérieure et des Libertés Locales ne m’apporte pas objectivement la garantie de son bon fonctionnement, car elle n’impose ni une analyse, ni une publication du code source du logiciel contenu dans la machine à voter.
que la conformité de la machine utilisée par rapport à celle certifiée par Veritas n’est assurée que par une obscure procédure de vérification de checksums. Le terme de “checksum”, même si il était traduit de l’anglais, est lui-même incompréhensible pour tout autre qu’un informaticien. Ladite procédure (interne à la machine) est implémentée par le constructeur alors qu’elle devrait être externe (copie du logiciel de la machine pour comparaison ultérieure avec une référence) et indépendante (experts désignés par les Parlements) comme c’est le cas en Belgique.
que par l’immatérialité des “ bulletins électroniques ”, un contrôle a posteriori du srutin s’avére impossible, ceci en contradiction avec l’exigence édictée par le Ministère de l’Intérieur, de la Sécurité Intérieure et des Libertés Locales concernant le principe même du caractère vérifiable du scrutin mentionné dans le réglement technique fixant les conditions d’agrément des machines à voter (JO du 27 novembre 2003 - NOR : INTX0306924A),
que par l’immatérialité des “ bulletins électroniques ” et le non-accès au code source du système informatique utilisé, je ne suis pas en mesure d’affirmer honnêtement que tout s’est déroulé correctement durant le scrutin,
que, malgré l’article L64 du code électoral précisant "Tout électeur atteint d’une infirmité certaine... est autorisé à se faire assister" X personnes nullement infirmes, mais simplement incapables d’utiliser la machine à voter ont voté avec l’assistance d’un autre électeur. Sans machine à voter, ces personnes auraient pu voter toutes seules, et le secret de leur vote aurait été préservé.
que la confidentialité est moindre devant une machine à voter (ou seuls les gestes sont dissimulés) que dans un isoloir (qui enferme complétement l’électeur).
que l’utilisation d’une machine à voter électronique lors d’une élection supprime l’opération de dépouillement et de fait tout contrôle du scrutin s’avére impossible pour les citoyens et les délégués des partis,
qu’en l’état, je ne peux pas certifier que le décompte final du scrutin figurant sur le “ ticket de caisse ” édité lors de la clôture du vote refléte bien la volonté exacte des électeurs,
que la machine proposée ne permettait pas de sélectionner de voter “ nul ” ( à différencier du “ vote blanc ”) . Il est à rappeler que choisir deux “ bulletins (tant bien même que cela rend nul le bulletin concerné) reste un droit pour l’électeur. Ce n’est pas à l’électeur de s’adapter à la machine mais au système utilisé de pouvoir répondre aux différents scénarios de choix de l’électeur,
que selon l’article R68 du code électoral, "Les bulletins...sont détruits en présence des électeurs". Aucune procédure similaire n’étant prévue pour les “ bulletins électroniques ”, le secret du vote n’est pas assuré.
qu’il n’a pas été proposé aux électeurs qui ne peuvent pas ou ne veulent pas utiliser les nouvelles technologies de recourir à un autre mode de scrutin portant ainsi atteinte au principe universel du suffrage.
Enfin, je ne peux que remarquer qu’il apparaît déplorable que le Ministère de l’Intérieur ait introduit lors de ce scrutin une discrimination entre les citoyens français qui auront pû contrôler les élections (vote traditionnel) et ceux qui n’en auront pas eu la possibilité (vote électronique).
En foi de quoi, il m’apparait légitime de ne pas parapher les différents procès verbaux que vous me présentez.
Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments respectueux,